Carnets de poèmes, de paroles et de voyages intérieurs du centre pénitentiaire de Maubeuge
29 Novembre 2017
J’ai vu mourir mon cœur
à la séparation de mon enfant
Une chaise dans un grenier
Les épinards sans les avoir goûtés
Le temps dans l’espace
Une moule sur un rocher
L’impossible sans rien y comprendre
Une auto à la casse
Mes courriers sans réponse
Le jour la nuit
Noël après le nouvel an
Mes glaçons dans le congélateur
Une question sans réponse
Mon pinceau sur un tableau
L’eau dans le désert
L’étincelle dans un feu
L’hiver en été
L’enfer dans le silence
*
J’ai vu mourir mon goût
Pour l’abject
Toute forme de pensée
J’ai vu mourir le laid
Naître le beau
J’ai vu mourir ma libido
La chrysalide de ton cœur
Mes rêves et disparaître mes héros
J’ai vu mourir ton cœur en même temps
Que ton âme
J’ai vu mourir les gens et les genres
J’ai vu mourir le professeur Moutarde
Dans le bureau
J’ai vu mourir les vainqueurs
et souffrir les perdants
*
J’ai vu mourir une étoile
Dans la voie lactée
Une abeille après m’avoir piqué
Une poupée dans une voiture
Un carré dans un cercle
Une chaussure dans les escaliers
J’ai vu mourir une batterie
Un matin d’hiver
Le soleil à huit heures du soir
Un poisson dans ma piscine
Un singe dans son lit
Le monde
Dans l’univers
*
J’ai vu mourir un nuage dans tes yeux
La patience dans le cœur des hommes
J’ai vu mourir Dieu dans les églises
Puis dans les livres
Puis dans l’humanité
J’ai vu mourir un peu de moi
À chaque mot
La lumière dans le puits
Les âmes de ceux
Qui se croient puissants
J’ai vu mourir l’encre
Dans le ventre des phrases
Ceux que j’aime
Pas leur amour
J’ai vu mourir des arbres en silence
mais tout criait autour d’eux
J’ai vu mourir mon ombre
À l’endroit où elle se couche
*
J’ai vu mourir tes yeux
J’ai vu mourir tes larmes
J’ai vu mourir ton sourire
J’ai vu mourir ton visage
J’ai vu mourir mon innocence
J’ai vu mourir ta pureté
J’ai vu mourir mon souffle
J’ai vu mourir le monde
J’ai vu mourir la mort
J’ai vu mourir
mon amour pour toi
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